Médicaments de l'insuffisance cardiaque

ParNowell M. Fine, MD, SM, Libin Cardiovascular Institute, Cumming School of Medicine, University of Calgary
Reviewed ByJonathan G. Howlett, MD, Cumming School of Medicine, University of Calgary
Vérifié/Révisé Modifié oct. 2025
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L'insuffisance cardiaque est un syndrome clinique dans lequel le cœur ne peut plus répondre aux besoins métaboliques du corps en raison d'une anomalie cardiaque structurelle et/ou fonctionnelle, entraînant un bas débit cardiaque, une pression de remplissage ventriculaire élevée, ou les deux (voir Insuffisance cardiaque).

Les médicaments principaux pour la prise en charge à long terme et l'amélioration de la survie chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque, particulièrement l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, sont:

Les classes de médicaments supplémentaires utilisées chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque comprennent:

Tous les patients doivent recevoir des informations claires et explicites sur leurs médicaments, dont ce qui suit:

  • L'importance du renouvellement des ordonnances au moment approprié

  • L'importance de l'observance du traitement

  • Comment reconnaître les effets indésirables

  • Quand contacter leur médecin

(Voir aussi Insuffisance cardiaque aiguë - Traitement, Insuffisance cardiaque chronique - Traitement, et Insuffisance cardiaque droite pour plus d'informations sur la sélection des médicaments.)

Classes de médicaments de l'insuffisance cardiaque

bêta-Bloqueurs

Les bêtabloqueurs agissent en inhibant de façon compétitive les récepteurs bêta-adrénergiques. Le bisoprolol et le métoprolol sont considérés comme des bêtabloqueurs cardiosélectifs, agissant principalement sur les récepteurs adrénergiques bêta-1. Le carvédilol, un bêta-bloqueur non sélectif, est également un vasodilatateur à effets alpha-bloqueurs et antioxydants. Les bêtabloqueurs produisent un effet inotrope et chronotrope négatif qui réduit les besoins en oxygène du myocarde, réduisent modestement la postcharge du ventricule gauche, et modèrent la libération de catécholamines en réponse au stress.

Chez les patients souffrant d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, les bêtabloqueurs, sauf contre-indication par ailleurs documentée (asthme, bloc auriculo-ventriculaire du deuxième ou troisième degré, ou intolérance significative antérieure), constituent un élément fondamental du traitement (1, 2). Dans l'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection réduite décompensée aiguë, les bêta-bloquants doivent de préférence être commencés une fois que le patient s'est stabilisé et ne présente aucun signe de congestion pulmonaire. Dans le cas des patients qui ont une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite et une exacerbation aiguë d'insuffisance cardiaque qui prennent déjà un bêta-bloquant, la dose ne doit pas être diminuée ou arrêtée sauf si nécessaire. Des bêta-bloqueurs spécifiques tels que le carvédilol et le succinate de métoprolol (c'est-à-dire, le métoprolol à action prolongée) améliorent la fraction d'éjection du ventricule gauche, la survie et d'autres accidents cardiovasculaires majeurs en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, y compris ceux qui présentent des symptômes sévères. Après le traitement initial, la fréquence cardiaque et la consommation myocardique d'oxygène diminuent et le volume systolique et la pression de remplissage restent inchangés. Avec la réduction de la fréquence cardiaque, la fonction diastolique s'améliore. Le remplissage ventriculaire redevient proche de la normale (augmentation en protodiastole) et est moins restrictif. L'amélioration de la fonction myocardique est mesurable chez certains patients après 6 à 12 mois mais peut prendre plus de temps; la fraction d'éjection et le débit cardiaque augmentent et la pression de remplissage du ventricule gauche diminue. La capacité d'effort augmente.

Chez les patients souffrant d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, les bêtabloqueurs ne sont généralement pas recommandés, bien qu'ils puissent être utilisés pour le contrôle de la fréquence cardiaque en cas de fibrillation auriculaire avec réponse ventriculaire rapide, ou pour le contrôle de l'hypertension chez les patients atteints d'une coronaropathie ou d'un antécédent d'infarctus du myocarde (1, 2).

La posologie initiale doit être basse (un quart de la dose journalière cible), puis progressivement augmentée sur 8 semaines en fonction de la tolérance. Les effets inotropes négatifs du bêta-blocage peuvent initialement entraîner une dépression cardiaque et une rétention liquidienne. Dans de tels cas, une augmentation temporaire de la dose de diurétiques et un ralentissement de l'augmentation du titrage de la dose de bêta-bloqueurs est justifiée. La tolérance peut s'améliorer avec le temps et tout doit être fait pour atteindre les doses cibles. Les doses cibles orales habituelles sont le carvédilol 25 mg 2 fois/jour (50 mg 2 fois/jour pour les patients 85 kg), le bisoprolol 10 mg 1 fois/jour, ou le succinate de métoprolol (à libération prolongée) 200 mg 1 fois/jour.

Médicaments inhibiteurs du système rénine-angiotensine

Inhibiteur des récepteurs de l'angiotensine/de la néprilysine (ARNI)

Les inhibiteurs des récepteurs de l'angiotensine/de la néprilysine (ARNI) sont une association médicamenteuse pour le traitement de l'insuffisance cardiaque. Ils comprennent un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II et un inhibiteur de la néprilysine (p. ex., sacubitril). La portion antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II bloque l'axe rénine-angiotensine-aldostérone au niveau du récepteur de l'angiotensine II. La néprilysine est une enzyme impliquée dans la dégradation des substances vasoactives telles que le BNP (brain [B-type] natriuretic peptide) et d'autres peptides. En inhibant la dégradation du BNP et d'autres peptides vasoactifs bénéfiques, ces médicaments abaissent la tension artérielle, diminuent la postcharge et augmentent la natriurèse. Les inhibiteurs de la néprilysine augmentant les taux de BNP, les taux de NTproBNP (qui ne sont pas augmentés par le médicament) doivent être utilisés à la place pour aider au diagnostic et à la prise en charge de l'insuffisance cardiaque.

Chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, l'inhibiteur des récepteurs de l'angiotensine/de la néprilysine (ARNI) sacubitril/valsartan réduit la mortalité de toutes causes et doit être envisagé chez tous les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite (1, 2). Il est préféré à un inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine ou à un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine s'il est toléré, et des données probantes sont en faveur d'une transition précoce des patients d'un inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine ou d'un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine vers un inhibiteur des récepteurs de l'angiotensine/de la néprilysine (ARNI), même en milieu hospitalier. Chez les patients qui ont une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, le sacubitril/valsartan peut être envisagé, particulièrement chez certains sous-groupes spécifiques (femmes et patients ayant une fraction d'éjection du ventricule gauche inférieure à 57%).

La dose initiale de sacubitril/valsartan est de 49/51 mg par voie orale 2 fois/jour pour les patients ayant déjà pris un inhibiteur de l'ECA ou un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II, et de 24/26 mg pour les patients qui prenaient auparavant une faible dose d'un inhibiteur de l'ECA ou d'un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II (p. ex., ≤ 10 mg/jour d'énalapril) ou chez les patients qui n'ont pas pris d'inhibiteur de l'ECA ou d'antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II ou qui ont une tension artérielle basse ou limite. Les inhibiteurs de l'ECA doivent être arrêtés 36 heures avant l'initiation du sacubitril/valsartan. Les patients qui prenaient auparavant un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II peuvent simplement passer au sacubitril/valsartan sans passer par une période d'élimination.

Les complications associées à l'utilisation des inhibiteurs des récepteurs de l'angiotensine/de la néprilysine (ARNI) comprennent l'hypotension, l'hyperkaliémie, l'insuffisance rénale et l'angio-œdème/œdème de Quincke. Le sacubitril est associé au valsartan (un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II) en raison du risque accru d'angio-œdème/œdème de Quincke associé à l'utilisation du sacubitril seul ou en association avec un inhibiteur de l'ECA. Pour cette raison, le traitement associant un inhibiteur de l'ECA plus un inhibiteur des récepteurs de l'angiotensine/de la néprilysine (ARNI) est absolument contre-indiqué.

Inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (ECA)

Tous les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite doivent recevoir des inhibiteurs de l'ECA par voie orale sauf contre-indication.

Les inhibiteurs de l'ECA réduisent la production d'angiotensine II et la dégradation de la bradykinine, des médiateurs qui affectent le système nerveux sympathique, la fonction endothéliale, le tonus vasculaire et la performance myocardique. Les effets hémodynamiques comprennent:

  • Vasodilatation artérielle et veineuse

  • Diminution soutenue de la pression de remplissage du ventricule gauche au repos et à l'effort

  • Diminution de la résistance vasculaire systémique

  • Effets favorables sur le remodelage ventriculaire

Les inhibiteurs de l'ECA prolongent la survie et réduisent les hospitalisations dues à l'insuffisance cardiaque (1, 2). Chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, leur rôle actuel est celui d'un agent de deuxième intention en cas d'intolérance d'un inhibiteur de la néprilysine/antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II ou si ce dernier n'est pas disponible, trop coûteux ou autrement non utilisable. Dans le cas des patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine ne sont généralement pas initiés à moins qu'ils ne soient déjà utilisés pour d'autres indications telles que l'athérosclérose, l'hypertension et la néphropathie diabétique.

La dose initiale doit généralement être basse (habituellement un quart à la moitié de la dose cible en fonction de la pression artérielle et de la fonction rénale); la dose est progressivement ajustée à la hausse sur 8 semaines selon la tolérance, puis poursuivie indéfiniment. Les posologies cibles habituelles des médicaments représentatifs comprennent l'énalapril 10 à 20 mg 2 fois/jour, le lisinopril 20 à 30 mg 1 fois/jour, et le ramipril 5 mg 2 fois/jour, il en existe de nombreux autres.

L'ionogramme sanguin et la fonction rénale doivent être évalués avant de débuter un inhibiteur de l'ECA, à 1 mois et après chaque augmentation importante de la posologie ou modification de l'état clinique. En cas de déshydratation ou de mauvaise fonction rénale en rapport avec une affection intercurrente, la dose d'inhibiteur de l'ECA peut devoir être réduite ou temporairement interrompue. Les contre-indications comprennent une créatininémie > 2,8 mg/dL [> 250 micromoles/L], une sténose bilatérale des artères rénales, une sténose des artères rénales sur rein unique ou un antécédent d'angio-œdème dû à des inhibiteurs de l'ECA.

Si les effets hypotenseurs (plus marqués en cas d'hyponatrémie ou de déplétion volémique) sont gênants, ils peuvent souvent être minimisés en séparant l'administration des autres médicaments hypotenseurs, en réduisant la dose des diurétiques associés, en utilisant un inhibiteur de l'ECA à action prolongée (p. ex., le périndopril), ou en prenant la dose au coucher. Les inhibiteurs de l'ECA entraînent souvent une élévation modérée réversible de la créatinine sérique due à la vasodilatation de l'artériole glomérulaire efférente. Une augmentation initiale de 20 à 30% de la créatinine n'est pas une raison d'arrêter le médicament mais nécessite une surveillance plus stricte, des augmentations plus lentes des posologies, la réduction de la dose de diurétiques, ou l'évitement des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). L'effet de l'aldostérone étant réduit, en particulier chez le patient recevant une supplémentation en potassium, il peut en résulter une rétention de potassium (hyperkaliémie). Une toux est observée chez de nombreux patients, probablement car la bradykinine s'accumule, mais d'autres causes de toux doivent également être recherchées. Si la toux en limite l'utilisation, un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II constitue une alternative raisonnable. Parfois, une éruption cutanée ou une dysgueusie peuvent être observées. L'angio-œdème/œdème de Quincke est rare, mais peut être fatal et est une contre-indication des inhibiteurs de l'ECA. Comme alternative, on peut utiliser des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II, bien qu'une allergie croisée n'ait que rarement été rapportée. Tous deux sont contre-indiqués pendant la grossesse.

Antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II

Les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine ciblent le récepteur de l'angiotensine II plutôt que l'enzyme de conversion de l'angiotensine. Ils sont moins susceptibles de provoquer une toux et un angio-œdème que les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine, et peuvent être utilisés lorsque ces effets indésirables proscrivent l'utilisation d'un inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (Heidenreich).

Dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, les inhibiteurs de l'ECA et les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II sont probablement tout aussi efficaces. Chez les patients présentant une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II (comme pour les inhibiteurs de l'ECA) ne sont généralement pas débutés sauf s'ils sont déjà utilisés pour d'autres indications telles que l'hypertension, la néphropathie diabétique ou la microalbuminurie.

Les doses cibles orales habituelles sont valsartan 160 mg 2 fois/jour, candésartan 32 mg 1 fois/jour et losartan 50 à 100 mg 1 fois/jour. L'introduction, l'ajustement des doses vers le haut et le suivi des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II et des inhibiteurs de l'ECA sont similaires. Les inhibiteurs de l'ECA, les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II peuvent entraîner une insuffisance rénale réversible et ils peuvent devoir être arrêtés ou leur dose réduite transitoirement en cas de maladie pouvant provoquer une déshydratation.

L'ajout d'un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II à un protocole composé d'un inhibiteur de l'ECA, d'un bêta-bloqueur et d'un antagoniste des récepteurs des minéralocorticoïdes est peu susceptible d'être utile et doit être évité étant donné le risque d'hyperkaliémie. Si un patient qui prend un inhibiteur de l'ECA ou un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II a encore des symptômes, un antagoniste des récepteurs des minéralocorticoïdes doit être instauré, et/ou un inhibiteur des récepteurs de l'angiotensine/de la néprilysine (ARNI) doit être utilisé.

Les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II sont contre-indiqués pendant la grossesse.

Antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes (antagonistes de l'aldostérone)

Les antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes bloquent les récepteurs de l'aldostérone dans le tubule contourné distal et les canaux collecteurs du rein. Ils sont considérés comme des diurétiques épargneurs du potassium en raison de leur effet diurétique relativement faible et du fait que, contrairement à la plupart des autres diurétiques, ils n'entraînent pas une perte de potassium sérique. Chez les patients souffrant d'insuffisance cardiaque, ces agents permettent un blocage du système rénine-angiotensine-aldostérone qui est complémentaire du mécanisme des inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine et des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine.

Un antagoniste des récepteurs des minéralocorticoïdes (ARM, également désigné comme antagonistes de l'aldostérone) est recommandé chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite, particulièrement ceux qui sont symptomatiques (Classe II à IV de la New York Heart Association) (1, 2). Chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée, les antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes semblent apporter le plus grand bénéfice en tant que thérapie primaire de l'insuffisance cardiaque chez les patients à l'extrémité inférieure du spectre des fractions d'éjection et sont également utilisés régulièrement chez les patients présentant une hypertension ou une coronaropathie préexistantes.

Les médicaments typiques comprennent la spironolactone 25 à 50 mg par voie orale 1 fois/jour et l'éplérénone (qui ne provoque pas de gynécomastie chez les hommes contrairement à la spironolactone). Les antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes peuvent réduire la mortalité, y compris par mort subite, en cas de fraction d'éjection du ventricule gauche < 30% et en cas d'insuffisance cardiaque chronique ou aiguë compliquant un infarctus du myocarde aigu.

Les suppléments de potassium doivent être arrêtés. La kaliémie et la créatinine doivent être vérifiées toutes les 1 à 2 semaines pendant les 4 à 6 premières semaines et après les changements de dose. La posologie est abaissée si la kaliémie se situe entre 5,0 et 5,5 mEq/L (5,5 mmol/L) et interrompue si la kaliémie est > 5,5 mEq/L (5,5 mmol/L), si la créatinine augmente au-dessus de 2,5 mg/dL (220 micromoles/L) ou si les anomalies ECG de l'hyperkaliémie sont présentes.

Inhibiteurs du cotransporteur sodium-glucose de type 2 (SGLT2i)

Les inhibiteurs de SGLT2 étaient initialement utilisés dans le traitement du diabète pour bloquer la réabsorption du glucose, provoquant ainsi une glycosurie et une diminution de la glycémie; ils peuvent également avoir des effets sur le myocarde et la vascularisation. Ces médicaments ont été précédemment démontrés comme prévenant l'apparition de l'insuffisance cardiaque chez les patients diabétiques de type 2. Les iSGLT2 dapagliflozine et empagliflozine ont par la suite démontré qu'ils réduisaient la mortalité cardiovasculaire et les hospitalisations chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite symptomatiques (Classe II à IV de la New York Heart Association). Ainsi, le traitement par iSGLT2 est recommandé chez tous les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite symptomatiques. Le traitement par iSGLT2i semble également bénéfique chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection préservée.

La dapagliflozine et l'empagliflozine peuvent être administrées 10 mg par voie orale 1 fois/jour. Sous l'effet du traitement, on observe une légère diminution (10 à 15%) du débit de filtration glomérulaire estimé qui ne progresse pas, une glycosurie et une légère réduction du poids corporel. Les risques comprennent l'infection fongique génitale et, chez les diabétiques, un très faible risque d'hypoglycémie et d'acidocétose diabétique. Ces médicaments ne sont généralement pas indiqués chez les patients atteints de diabète de type I, d'hypotension artérielle ou de DFGe bas (< 30 mL/min/1,73 m2).

La digoxine

La digoxine inhibe la pompe Na-K (Na+, K+-ATPase), ce qui a un effet inotrope positif faible, réduit l'activité sympathique, bloque le nœud auriculoventriculaire (ralentissant la fréquence ventriculaire dans la fibrillation auriculaire ou prolongeant l'espace PR en rythme sinusal), réduit la vasoconstriction et améliore le flux sanguin rénal.

La digoxine n'a pas démontré de bénéfice prouvé sur la survie mais, lorsqu'elle est utilisée en complément du traitement médical standard conforme aux recommandations, elle peut aider à contrôler les symptômes et réduire la probabilité d'hospitalisation chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite (1, 2). La digoxine peut également être utilisée pour le contrôle de la fréquence cardiaque chez les patients atteints de fibrillation auriculaire et d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite ou préservée.

Si la fonction rénale est normale, la digoxine 0,125 à 0,25 mg par voie orale 1 fois/jour selon l'âge, le sexe et la masse corporelle permet une digitalisation complète en 1 semaine environ (5 demi-vies). Une digitalisation plus rapide peut être obtenue mais, contrairement au traitement de la fibrillation auriculaire, il n'y a généralement que peu de raisons pour digitaliser rapidement (c'est-à-dire, de charger en digoxine) les patients qui ont une insuffisance cardiaque. Ainsi, commencer simplement la digoxine à 0,125 mg par voie orale 1 fois/jour (en cas de fonction rénale normale) ou la digoxine 0,125 mg par voie orale chaque lundi, mercredi et vendredi (en cas de fonction rénale anormale) est suffisant en cas d'insuffisance cardiaque.

La toxicité de la digoxine est une préoccupation étant donné sa fenêtre thérapeutique étroite, particulièrement chez les patients présentant une dysfonction rénale et peut-être chez les femmes. Ces patients peuvent avoir besoin d'une posologie orale inférieure, de même que les patients âgés, les patients qui ont une masse maigre peu importante et les patients qui prennent également de l'amiodarone. Les effets toxiques les plus importants sont les troubles du rythme qui mettent en jeu le pronostic vital (p. ex., fibrillation ventriculaire, tachycardie ventriculaire, bloc auriculoventriculaire complet). La tachycardie ventriculaire bidirectionnelle, la tachycardie jonctionnelle non paroxystique qui apparaissent en présence d'une fibrillation auriculaire et d'une hyperkaliémie sont des signes graves d'intoxication digitalique. Des nausées, des vomissements, une anorexie, une diarrhée, une confusion, une amblyopie et, rarement, une xérophtalmie peuvent également être observées. En cas d'hypokaliémie ou d'hypomagnésémie (souvent due à l'utilisation de diurétiques), des doses plus faibles et des taux sériques peuvent encore provoquer une toxicité; ainsi, les taux d'électrolytes doivent être surveillés chez les patients prenant des diurétiques et de la digoxine.

Diurétiques

Bien que la spironolactone soit recommandée chez tous les patients présentant une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite et utilisée chez de nombreux patients atteints d'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection préservée, des diurétiques supplémentaires sont administrés aux patients insuffisants cardiaques (indépendamment de la fraction d'éjection sous-jacente) qui présentent une surcharge volumique actuelle ou antérieure; la posologie est ajustée à la dose la plus faible permettant de stabiliser le poids et de soulager les symptômes (1, 2). Les diurétiques pris de manière chronique peuvent être programmés ou utilisés au besoin par les patients en fonction des œdèmes périphériques ou des changements de poids. Les diurétiques constituent une thérapie primaire en cas d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée symptomatique. Ils sont utilisés avec prudence en cas d'insuffisance cardiaque droite, particulièrement en cas de cœur pulmonaire, en raison de la sensibilité aux petits changements de précharge.

Les diurétiques de l'anse doivent être utilisés initialement pour le contrôle de la surcharge volumique, mais leur dose doit être réduite si possible en faveur des antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes.

Les diurétiques thiazidiques ne sont normalement pas utilisés seuls, sauf s'ils sont administrés en traitement de l'hypertension; cependant, un diurétique thiazidique peut être ajouté à un diurétique de l'anse pour augmenter la diurèse et réduire la dose de diurétiques de l'anse. L'hydrochlorothiazide, la métolazone et la chlorthalidone peuvent être utilisés de cette manière.

Les diurétiques de l'anse couramment utilisés comprennent le furosémide, le bumétanide et le torsémide. La dose initiale de ces médicaments dépend du fait que le patient ait ou non déjà reçu des diurétiques de l'anse. Les doses de départ courantes sont:

  • Furosémide 20 à 40 mg par voie orale 1 fois/jour ou 2 fois/jour

  • Bumétanide 0,5 à 1,0 mg par voie orale 1 fois/jour

  • Torasémide 10 à 20 mg par voie orale 1 fois/jour

Si nécessaire, les diurétiques de l'anse peuvent être titrés jusqu'à des doses de furosémide 120 mg par voie orale 2 fois/jour, de bumétanide 2 mg par voie orale 2 fois/jour et de torsémide 40 mg par voie orale 2 fois/jour en fonction de la réponse et de la fonction rénale. Le bumétanide et le torsémide ont une meilleure biodisponibilité que le furosémide. Si les patients passent d'un diurétique de l'anse à un autre, ils doivent recevoir des doses équivalentes. Le furosémide 40 mg est équivalent à 1 mg de bumétanide et tous deux sont équivalents à 20 mg de torsémide.

Dans les cas réfractaires, des diurétiques de l'anse IV ou la métolazone 2,5 à 10 mg par voie orale peuvent être utilisés pour un effet additif. La perfusion IV de furosémide (5 à 10 mg/h) ou d'un autre diurétique de l'anse peut être utile chez des patients sélectionnés en cas d'œdème pulmonaire grave. Un bolus de diurétique de l'anse doit être administré avant de commencer la perfusion intraveineuse et avant chaque augmentation du débit de perfusion.

Les diurétiques de l'anse (en particulier lorsqu'ils sont utilisés en association avec les diurétiques thiazidiques) peuvent entraîner une hypovolémie avec hypotension, une hyponatrémie, une hypomagnésémie et une hypokaliémie sévère. La dose de diurétique nécessaire à la phase aiguë peut généralement être réduite de façon graduelle; l'objectif est la dose la plus faible permettant de maintenir la stabilité du poids et le contrôle les symptômes. Lorsque l'insuffisance cardiaque s'améliore, le diurétique peut être arrêté si d'autres médicaments améliorent la fonction cardiaque et soulagent les symptômes de l'insuffisance cardiaque. L'utilisation de doses diurétiques supérieures à celles requises diminue le débit cardiaque, altère la fonction rénale, provoque une hypokaliémie et augmente la mortalité. L’ionogramme sanguin et la fonction rénale sont vérifiés, initialement quotidiennement (lorsque les diurétiques sont donnés IV) et par la suite, au besoin, en particulier après une augmentation de la dose.

Les antagonistes des récepteurs de la vasopressine (hormone antidiurétique) ne sont pas fréquemment utilisés, bien qu'ils puissent être utiles dans les cas d'hyponatrémie réfractaire sévère chez les patients souffrant d'insuffisance cardiaque.

Inotropes

Différents médicaments inotropes positifs ont été évalués dans l'insuffisance cardiaque, mais en dehors de la digoxine, ils entraînent une augmentation du risque de mortalité. Ces médicaments peuvent être groupés par mécanisme d'action comme:

  • Adrénergique (noradrénaline, adrénaline, dobutamine, dopamine)

  • Non-adrénergique (énoximone et milrinone [inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 3], lévosimendane [sensibilisateur du calcium])

Le soutien inotrope est important dans le traitement de l'insuffisance cardiaque aiguë avec choc cardiogénique. Le choix de l'agent inotrope dépend de la disponibilité, de la pratique locale et de la postcharge. Par exemple, chez un patient qui a une fraction d'éjection du ventricule gauche gravement réduite, une vasoconstriction périphérique et une pression artérielle élevée ou normale, le soutien inotrope initial peut être associé à un vasodilatateur intraveineux tel que le nitroprussiate, puis transitionné vers la milrinone (qui a des effets vasodilatateurs légers). D'autre part, un patient qui a une fraction d'éjection réduite et une hypotension avec vasodilatation périphérique peut nécessiter un agent inotrope ayant des effets vasopresseurs (noradrénaline, adrénaline à forte dose), ou une combinaison d'un agent inotrope et d'un agent vasoconstricteur pur. Une synergie peut être obtenue en utilisant à la fois un agent inotrope adrénergique et non-adrénergique.

Chez les patients présentant une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée avancée (stade D) réfractaire aux thérapies standard, les perfusions inotropes continues à long terme peuvent être utilisées comme pont vers la transplantation ou comme thérapie palliative (2).

Inhibiteurs du nœud sinusal

L'ivabradine est un bloqueur des canaux If (canaux « funny ou drôles » entrants dans le nœud sinusal) qui agit au niveau du nœud sinusal pour ralentir la fréquence cardiaque. Étant donné que ces canaux sont présents principalement dans les cellules du stimulateur cardiaque, ces médicaments ne sont pas utiles dans le traitement des patients qui ne sont pas en rythme sinusal. L'ivabradine est recommandée chez les patients présentant une insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite qui ont une insuffisance cardiaque symptomatique (classe II ou III de la New York Heart Association), un rythme sinusal normal, et une fréquence cardiaque > 70 battements/minute malgré un traitement médical conforme aux recommandations (à la dose cible de bêta-bloquant ou ne pouvant tolérer une augmentation supplémentaire de la dose de bêta-bloquant) (1, 2).

La dose initiale d'ivabradine est de 2,5 à 5 mg par voie orale 2 fois/jour, titrée à 2 semaines d'intervalle pour obtenir une fréquence cardiaque de 50 à 60 battements/minute; la dose maximale est de 7,5 mg 2 fois/jour.

Stimulateur soluble de la guanylate cyclase

Le vericiguat est un stimulateur oral soluble de la guanylate cyclase qui augmente la voie de la guanosine monophosphate cyclique (GMP) et sensibilise la guanylate cyclase soluble au monoxyde d’azote endogène, ce qui entraîne une vasodilatation pulmonaire. Le vericiguat est une option permettant d'améliorer les résultats chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection réduite présentant une aggravation des symptômes d'insuffisance cardiaque malgré un traitement médical optimal conforme aux lignes directrices, qui peut réduire la mortalité ou l'hospitalisation.

Vasodilatateurs

L'hydralazine et les nitrates (tels que le dinitrate d'isosorbide) sont des vasodilatateurs directs qui peuvent améliorer l'hémodynamique, réduire la régurgitation valvulaire et augmenter la capacité d'exercice sans provoquer d'insuffisance rénale significative.

La combinaison de l'hydralazine et du dinitrate d'isosorbide peut être envisagée chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection réduite qui sont intolérants aux inhibiteurs de l'ECA ou aux antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II (généralement en raison d'une dysfonction rénale importante) (1, 2). De plus, chez les patients d'ascendance africaine, cette association, lorsqu'elle est ajoutée au traitement standard, peut réduire la mortalité et les hospitalisations et améliorer la qualité de vie.

Lorsqu'utilisé à la place du traitement par inhibiteur de l'ECA ou antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II, l'hydralazine est commencée à 25 mg par voie orale 4 fois/jour et augmentée toutes les 3 à 5 jours jusqu'à une posologie cible totale de 300 mg/jour; cependant, nombre de patients ne peuvent tolérer > 200 mg/jour du fait de l'hypotension. Le dinitrate d'isosorbide est débuté à 20 mg par voie orale 3 fois/jour (avec un intervalle de 12 heures sans nitrate) et les doses sont augmentées jusqu'à une dose cible de 40 à 50 mg 3 fois/jour. Lorsqu'ajoutée à un traitement par inhibiteur de l'ECA ou par antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II, la thérapie par hydralazine plus nitrate est initiée à 37,5 mg et le dinitrate d'isosorbide à 20 mg par voie orale 3 fois/jour, avec une dose maximale de 75 mg et 40 mg 3 fois/jour. Ces doses sont également disponibles en association à dose fixe.

Les nitrates et les inhibiteurs de la phosphodiestérase-5 ont été utilisés pour soulager les symptômes chez les patients qui ont une insuffisance cardiaque à fraction d'éjection préservée, mais aucun n'est recommandé pour une utilisation systématique chez ces patients (2).

Références pour les classes de médicaments

  1. 1. McDonagh TA, Metra M, Adamo M, et al: 2021 ESC Guidelines for the diagnosis and treatment of acute and chronic heart failure: Developed by the Task Force for the diagnosis and treatment of acute and chronic heart failure of the European Society of Cardiology (ESC) with the special contribution of the Heart Failure Association (HFA) of the ESC. Eur Heart J 42(36):3599-3726, 2021. doi: 10.1093/eurheartj/ehab368

  2. 2. Heidenreich PA, Bozkurt B, Aguilar D, et al: 2022 AHA/ACC/HFSA Guideline for the Management of Heart Failure: A report of the American College of Cardiology/American Heart Association Joint Committee on Clinical Practice Guidelines. Circulation 145:e895–e1032, 2022, doi: 10.1161/CIR.0000000000001063

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