(Voir aussi Revue générale des syndromes néphrotiques.)
Le récepteur phospholipase A2 de type M (PLA2R) dans le podocyte glomérulaire a été identifié comme étant l'antigène cible majeur dans des complexes immuns déposés.
La glomérulonéphrite extra-membraneuse affecte principalement les adultes, chez qui elle est une cause fréquente de syndrome néphrotique.
Étiologie
La glomérulonéphrite extra-membraneuse est habituellement idiopathique mais peut être secondaire à l'une des causes suivantes:
Selon l'âge du patient, 4 à 20% présentent un cancer sous-jacent, dont des tumeurs solides du poumon, du côlon, de l'estomac, du sein ou du rein; un lymphome de Hodgkin ou non hodgkinien; une leucémie lymphoïde chronique; et un mélanome.
La glomérulonéphrite extra-membraneuse est une maladie rare chez l'enfant et son apparition est habituellement consécutive à une infection par le virus de l'hépatite B ou un lupus érythémateux disséminé.
La thrombose veineuse rénale est plus fréquente dans la glomérulonéphrite extra-membraneuse et elle est généralement asymptomatique, mais elle peut se manifester par une douleur du flanc, une hématurie et une hypertension. Elle peut évoluer vers une embolie pulmonaire.
Symptomatologie
Habituellement, le patient présente initialement des œdèmes et une protéinurie de type néphrotique, parfois associée à une hématurie microscopique et une HTA. Une symptomatologie évocatrice de l'existence d'un trouble entraînant une glomérulonéphrite extra-membraneuse (p. ex., une tumeur) peut être initialement présente.
Diagnostic
Le diagnostic est suggéré par le développement du syndrome néphrotique, en particulier chez les patients exposés à des facteurs de glomérulonéphrite extra-membraneuse. Le diagnostic est confirmé par la biopsie.
La protéinurie est présente à un taux néphrotique dans 80% des cas. Les examens complémentaires sont pratiqués comme dans le syndrome néphrotique. Le taux de filtration glomérulaire, lorsqu'il est mesuré, est normal ou diminué.
Le microscope électronique permet de distinguer les complexes immuns sous forme de dépôts denses (voir Caractéristiques en microscopie électronique des troubles immunologiques glomérulaires). Dès le début, des dépôts extramembraneux denses séparés par des pics correspondants à la lamina densa sont visibles. Plus tard, des dépôts apparaissent au sein de la membrane basale glomérulaire et un épaississement prononcé se produit. Le long de la membrane basale glomérulaire, on note un dépôt diffus et granuleux d'IgG, sans prolifération cellulaire, exsudation ou nécrose.
L'identification de la présence ou de l'absence d'anticorps anti-PLA2R et de la sous-classe des dépôts d'IgG peut permettre de différencier la néphropathie membranaire idiopathique de la néphropathie secondaire. Par exemple, les dépôts dans la forme idiopathique sont positifs pour les anticorps anti-PLA2R, principalement des IgG4, alors que les anticorps anti-PLA2R sont généralement négatifs et que les IgG 1 et 2 prédominent dans la glomérulonéphrite extra-membraneuse associée à une tumeur maligne (1).
Diagnostic étiologique
Le bilan des patients chez qui on diagnostique une glomérulonéphrite extra-membraneuse comprend généralement les éléments suivants:
La recherche d'un cancer occulte est habituellement limitée au dépistage adapté à l'âge (p. ex., une coloscopie chez les patients de > 50 ans ou présentant d'autres symptômes ou facteurs de risque, une mammographie chez la femme de > 40 ans, une mesure de l'Ag prostatique spécifique chez les hommes de > 50 ans [> 40 ans pour les Noirs], une rx thorax et éventuellement une TDM du thorax en cas de risque élevé de cancer du poumon).
Références pour le diagnostic
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Beck LH , Bonegio RG, Lambeau G: M-type phospholipase A2 receptor as target antigen in idiopathic membranous nephropathy. N Engl J Med 361(1):11, 2009.
Pronostic
Environ 25% des patients présentent une rémission spontanée, 25% développent une protéinurie persistante de type non néphrotique, 25% développent un syndrome néphrotique persistant et 25% évoluent vers la néphropathie terminale. La femme, l'enfant et le jeune adulte qui ont une protéinurie de type non néphrotique et le patient présentant une fonction rénale normale 3 ans après le diagnostic ont une maladie faiblement évolutive. En cas de protéinurie de type néphrotique, plus de 50% des patients asymptomatiques ou présentant des œdèmes contrôlables sous diurétiques, seront en rémission partielle ou complète dans les 3 à 4 ans.
Le risque de progression vers une insuffisance rénale est plus élevé en cas de
Traitement
Le traitement principal est orienté selon l'étiologie. Parmi les patients qui présentent une glomérulonéphrite extra-membraneuse idiopathique, les patients asymptomatiques qui ont une protéinurie de type non néphrotique n'ont pas besoin de traitement; la fonction rénale doit être surveillée périodiquement (p. ex., 2 fois/an même si elle paraît stable).
En cas de protéinurie de type néphrotique chez un patient asymptomatique ou présentant des œdèmes contrôlables sous diurétiques, le traitement doit être celui du syndrome néphrotique.
Un inhibiteur de l'ECA ou un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II peut être administré en cas d'HTA; ces médicaments sont également bénéfiques chez les patients qui n'ont pas d'HTA, car ils réduisent la protéinurie.
Traitement immunosuppresseur
Les immunosuppresseurs ne doivent être envisagés qu'en cas de syndrome néphrotique symptomatique idiopathique et chez le patient à haut risque de maladie évolutive. Cependant, il n'existe aucune preuve solide que les adultes qui ont un syndrome néphrotique bénéficient à long terme du traitement immunosuppresseur. Les patients plus âgés et les malades chroniques présentent un risque majoré de complications infectieuses dues aux immunosuppresseurs.
Aucun protocole de consensus n'existe, mais historiquement un protocole fréquent comprend les corticostéroïdes puis le chlorambucil. Cependant, ce protocole n'est pas actuellement utilisé (voir la Cochrane abstract review. Immunosuppressive treatment for idiopathic membranous nephropathy in adults with nephrotic syndrome). Cependant, il n'existe aucune preuve solide que les adultes qui ont un syndrome néphrotique tirent un bénéfice à long terme d'un traitement immunosuppresseur. La plupart des experts préfèrent l'association de cyclophosphamide et de corticostéroïdes du fait de leur meilleur profil d'innocuité. Des données plus récentes ont suggéré un bénéfice sous rituximab (1).
Les thérapies de valeur prouvée à long terme comprennent les immunoglobulines IV et les AINS.
La transplantation rénale est une possibilité en cas de néphropathie terminale. La glomérulonéphrite extra-membraneuse récidive chez environ 10% des patients, avec une perte de greffe chez 50% au maximum.
Références pour le traitement
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Fervenza FC, Appel GB, Barbour SJ, et al: Rituximab or cyclosporine in the treatment of membranous nephropathy. N Engl J Med 381(1):36-46, 2019. doi: 10.1056/NEJMoa1814427.
Points clés
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Bien que la glomérulonéphrite extra-membraneuse soit habituellement idiopathique, les patients peuvent présenter des troubles associés traitables, comme des cancers, des troubles auto-immuns ou des infections.
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Le patient présente initialement des manifestations typiques du syndrome néphrotique (p. ex., œdèmes, protéinurie de type néphrotique, parfois hématurie microscopique et hypertension).
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Confirmer le diagnostic par une biopsie rénale et envisager des troubles et causes associés.
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Traiter le syndrome néphrotique et traiter l'hypertension initialement par inhibition de l'angiotensine.
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Envisager les immunosuppresseurs exclusivement en cas de syndrome néphrotique symptomatique idiopathique et chez le patient à haut risque de maladie évolutive.