Hyperthyroïdie

(Thyrotoxicose)

ParGlenn D. Braunstein, MD, Cedars-Sinai Medical Center
Vérifié/Révisé août 2022
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L'hyperthyroïdie est caractérisée par un hypermétabolisme et une élévation des concentrations sériques d'hormones thyroïdiennes libres. Les symptômes comprennent des palpitations, une fatigue, une perte de poids, une intolérance à la chaleur, une anxiété et des tremblements. Le diagnostic est clinique et facilité par les tests des fonctions thyroïdiennes. Le traitement dépend de l'étiologie.

(Voir aussi Revue générale de la fonction thyroïdienne.)

L'hyperthyroïdie peut être classée en fonction de l'absorption de l'iode radioactif dans la thyroïde et de la présence ou de l'absence de stimulateurs de la thyroïde circulants (voir tableau Résultats des tests des fonctions thyroïdiennes dans diverses situations cliniques).

Étiologie de l'hyperthyroïdie

L'hyperthyroïdie peut résulter d'une synthèse et d'une sécrétion accrue d'hormones thyroïdiennes (thyroxine [T4] et triiodothyronine [T3]) par la thyroïde, du fait de la présence d'anticorps circulants stimulant la thyroïde ou d'un hyperfonctionnement autonome de la thyroïde. Elle peut aussi résulter d'une libération excessive d'hormones thyroïdiennes par la thyroïde, sans augmentation de la synthèse. Une telle libération est souvent causée par une destruction parenchymateuse au cours de différents types de thyroïdites.

Les causes les plus fréquentes comprennent les suivantes

  • Maladie de Graves-Basedow

  • Goitre multinodulaire

  • Thyroïdite

  • Nodule unique, autonome, hyperfonctionnel (nodule "chaud")

La maladie de Graves-Basedow (goitre diffus toxique), la cause la plus fréquente de l'hyperthyroïdie est caractérisée par une hyperthyroïdie et un ou plusieurs des signes suivants:

La maladie de Graves-Basedow est causée par un auto-anticorps dirigé contre le récepteur thyroïdien de la TSH; contrairement à la plupart des auto-anticorps qui sont inhibiteurs, cet auto-anticorps est stimulant, provoquant ainsi la synthèse et la sécrétion continue en excès de T4 et de T3. La maladie de Graves-Basedow (comme la thyroïdite d'Hashimoto) survient parfois en association avec d'autres maladies auto-immunes, y compris le diabète sucré de type 1, le vitiligo, l'alopécie précoce, l'anémie de Biermer, des troubles du tissu conjonctif, et le syndrome de polyendocrinopathies auto-immunes. L'hérédité augmente le risque de maladie de Graves-Basedow, bien que les gènes impliqués soient inconnus.

La physiopathologie de l'ophtalmopathie infiltrante (responsable de l'exophtalmie dans la maladie de Graves-Basedow) est mal comprise, mais pourrait résulter d'immunoglobulines dirigées contre les récepteurs de la TSH dans les fibroblastes et la graisse orbitaires se traduisant par la libération de cytokines pro-inflammatoires, de l'inflammation et l'accumulation de glycosaminoglycanes. L'ophtalmopathie peut également survenir avant l'apparition d'une hyperthyroïdie ou même 20 ans plus tard et s'aggrave ou s'améliore souvent indépendamment de l'évolution clinique de l'hyperthyroïdie. Une ophtalmopathie typique en présence d'une fonction thyroïdienne normale est appelée maladie de Graves-Basedow euthyroïdienne.

Le goitre toxique uni- ou multinodulaire (maladie de Plummer) résulte parfois de mutations du gène du récepteur de la TSH ce qui entraîne une stimulation thyroïdienne continue. Les patients atteints de goitre nodulaire toxique n'ont aucune des manifestations auto-immunes ni les anticorps circulants observés chez les patients atteints de la maladie de Graves-Basedow. De plus, contrairement à la maladie de Graves-Basedow, le goitre toxique uni- ou multinodulaire ne présente pas de rémission.

Les maladies inflammatoires de la thyroïde (thyroïdite) comprennent la thyroïdite granulomateuse subaiguë, la thyroïdite d'Hashimoto, et la thyroïdite lymphocytaire silencieuse, une variante de la thyroïdite d'Hashimoto. L'hyperthyroïdie est plus fréquente dans la thyroïdite granulomateuse subaiguë et est due à une destruction du parenchyme de la glande et à la libération de l'hormone stockée, sans synthèse accrue. Une hypothyroïdie peut suivre.

Le syndrome de sécrétion inappropriée de la TSH est une cause rare. Les patients qui ont une hyperthyroïdie ont une TSH pratiquement indétectable à l'exception de ceux qui ont un adénome hypophysaire sécrétant de la TSH ou une résistance hypophysaire aux hormones thyroïdiennes. Les concentrations de TSH sont élevées, et la TSH produite dans ces deux troubles est biologiquement plus active que la TSH normale. Une augmentation de la sous-unité alpha de la TSH dans le sang (très utile pour le diagnostic différentiel) survient chez des patients porteurs d'un adénome hypophysaire secrétant de la TSH.

Une hyperthyroïdie liée à des médicaments peut résulter de la prise d'amiodarone, d'inhibiteurs de point de contrôle (check-point inhibitors) utilisés en cancérothérapie, d'alemtuzumab utilisé dans le traitement de la sclérose en plaques ou d'interféron alpha, pouvant être à l'origine d'une thyroïdite avec hyperthyroïdie et d'autres troubles de la thyroïde. Bien que le plus souvent cause d'hypothyroïdie, le lithium peut rarement provoquer une hyperthyroïdie. Les patients recevant ces médicaments doivent être étroitement suivis.

La thyrotoxicose factice est une hyperthyroïdie résultant de l'ingestion intentionnelle ou accidentelle d'hormones thyroïdiennes en grande quantité.

L'ingestion d'iode en excès provoque une hyperthyroïdie s'accompagnant d'une faible captation d'iode radioactif. L'hyperthyroïdie survient le plus souvent chez des patients porteurs d'un goitre nodulaire toxique (en particulier les patients âgés) qui reçoivent des médicaments contenant de l'iode (p. ex., amiodarone) ou qui subissent des rx avec agents de contraste iodé. La cause pourrait être que l'excès d'iode alimente des zones fonctionnellement autonomes de la thyroïde (c'est-à-dire, non régulées par la TSH). L'hyperthyroïdie persiste habituellement aussi longtemps que l'excès d'iode reste dans la circulation.

La môle hydatiforme et le choriocarcinome s'accompagnent de concentrations sériques élevées de gonadotrophine chorionique humaine (hCG), un stimulateur faible de la thyroïde. Les concentrations d'hCG sont les plus élevées au cours du 1er trimestre de la grossesse et entraînent une diminution de la TSH sérique et une augmentation légère de la T4 libre sérique. L'augmentation de la stimulation thyroïdienne peut être causée par des concentrations accrues d'hCG partiellement désialylée, une variante d'hCG qui semble être un stimulateur de la thyroïde plus puissant que l'hCG sialylée. L’hyperthyroïdie pendant la grossesse molaire, le choriocarcinome et l’hyperemesis gravidarum est transitoire; la fonction thyroïdienne se normalise lorsque la grossesse molaire est évacuée, le choriocarcinome est traité de façon appropriée, ou l’hyperemesis gravidarum s’apaise.

L'hyperthyroïdie non auto-immune autosomique dominante se manifeste durant la petite enfance. Elle résulte de mutations du gène du récepteur de la TSH ce qui entraîne une stimulation thyroïdienne continue.

Le cancer métastatique de la thyroïde est une cause possible. La surproduction d'hormone thyroïdienne provient rarement de carcinome folliculaire métastatique fonctionnel, en particulier de leurs métastases pulmonaires.

Le goitre ovarien se développe quand un tératome de l'ovaire contient suffisamment de tissu thyroïdien pour entraîner une hyperthyroïdie vraie. La fixation de l'iode radioactif se situe dans le pelvis, et la fixation par la thyroïde est généralement absente.

Physiopathologie de l'hyperthyroïdie

Dans l'hyperthyroïdie, la T3 sérique augmente généralement plus que la T4, probablement à cause de la sécrétion accrue de T3 ainsi que la conversion de T4 en T3 dans les tissus périphériques. Chez certains patients, seule la T3 est élevée (toxicose T3).

La toxicose T3 peut survenir dans l'un quelconque des troubles qui causent habituellement une hyperthyroïdie, dont la maladie de Graves-Basedow, le goitre multinodulaire et le nodule thyroïdien autonome solitaire. Si la toxicose T3 n'est pas traitée, le patient développe habituellement des anomalies biologiques typiques de l'hyperthyroïdie (c'est-à-dire, une augmentation de la T4 et de la captation de l'iode 123). Les différentes formes de thyroïdites ont généralement une phase d'hyperthyroïdie suivie d'une phase d'hypothyroïdie.

Symptomatologie de l'hyperthyroïdie

La majeure partie de la symptomatologie est la même quelle que soit la cause. Les exceptions comprennent l'ophtalmopathie et la dermopathie infiltrante, qui surviennent uniquement dans la maladie de Graves-Basedow.

Pièges à éviter

  • Les patients âgés hyperthyroïdiens peuvent avoir des symptômes plus proches de la dépression ou de la démence.

La présentation clinique peut être bruyante ou subtile. Un goitre ou un nodule peut être présent.

De nombreux symptômes fréquents de l'hyperthyroïdie sont dus à une sensibilité accrue aux hormones adrénergiques, tels que la nervosité, les palpitations, l'hyperactivité, l'hypersudation, l'hypersensibilité à la chaleur, l'asthénie, l'augmentation de l'appétit, la perte de poids, l'insomnie, la sensation de faiblesse et des selles fréquentes (parfois une diarrhée). Une hypoménorrhée peut être présente.

Les signes peuvent comprendre une peau chaude et humide; des tremblements; une tachycardie; une augmentation de la pression différentielle et une fibrillation auriculaire.

Les patients âgés, en particulier ceux qui ont un goitre nodulaire toxique, peuvent présenter une forme atypique (hyperthyroïdie apathique ou masquée) avec des symptômes plus apparentés à la dépression ou la démence. La plupart n'ont pas d'exophtalmie ni de tremblements. Une fibrillation auriculaire, des pertes de connaissance, des altérations de la conscience, une insuffisance cardiaque, et une faiblesse sont plus fréquentes. La symptomatologie peut ne concerner qu'un seul organe.

Les signes oculaires comprennent un regard fixe, une rétraction palpébrale, et une légère injection conjonctivale et sont en grande partie due à la stimulation adrénergique excessive. Ils disparaissent en général avec le traitement. L'ophtalmopathie infiltrante, une évolution plus grave, est spécifique de la maladie de Graves-Basedow et peut survenir des années avant ou après l'hyperthyroïdie. Elle est caractérisée par une douleur orbitaire, un larmoiement, une irritation, une photophobie, une infiltration des tissus rétro-orbitaires, une exophtalmie et une infiltration lymphocytaire des muscles extra-oculaires, entraînant une faiblesse des muscles oculaires à l'origine d'une diplopie.

Manifestations oculaires de la maladie de Basedow
Manifestations oculaires de la maladie de Basedow—Exophtalmie
Manifestations oculaires de la maladie de Basedow—Exophtalmie

© Springer Science+Business Media

Gros plan sur l'exophtalmie
Gros plan sur l'exophtalmie

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Manifestations oculaires de la maladie de Basedow, incapacité à fermer les yeux
Manifestations oculaires de la maladie de Basedow, incapacité à fermer les yeux

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Manifestations oculaires de la maladie de Basedow, poches infraorbitaires
Manifestations oculaires de la maladie de Basedow, poches infraorbitaires

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Ophtalmopathie infiltrante
Ophtalmopathie infiltrante
Un patient atteint de la maladie de Graves-Basedow a des signes oculaires, dont des fentes palpébrales agrandies, une r... en apprendre davantage

By permission of the publisher. De Mulligan M, Cousins M. In Atlas of Anesthesia: Preoperative Preparation and Intraoperative Monitoring. Edited by R Miller (series editor) and JL Lichtor. Philadelphia, Current Medicine, 1998.

La dermopathie infiltrante, également appelée myxœdème prétibial (un terme qui prête à confusion, le myxœdème évoquant l'hypothyroïdie), est caractérisée par une infiltration ne prenant pas le godet par une substance protéique, habituellement dans la région prétibiale. Elle survient rarement en l'absence de l'ophtalmopathie de Graves-Basedow. La lésion est souvent prurigineuse et érythémateuse à ses débuts et devient par la suite épaisse. La dermopathie infiltrante peut apparaître des années avant ou après l'hyperthyroïdie.

Crise thyrotoxique

La crise thyrotoxique est une forme aiguë d'hyperthyroïdie qui résulte d'une hyperthyroïdie sévère non traitée ou mal traitée. Elle est rare, survient chez des patients atteints de maladie de Graves-Basedow ou de goitre multinodulaire toxique (le nodule solitaire toxique est une cause moins fréquente et provoque généralement des manifestations moins graves). Elle peut être déclenchée par une infection, un traumatisme, une intervention chirurgicale, une embolie, une acidocétose diabétique ou une prééclampsie.

La crise thyrotoxique provoque de brusques et intenses symptômes d'hyperthyroïdie avec l'un ou plusieurs des signes suivants: fièvre, faiblesse et atrophie musculaire marquée, agitation extrême avec de larges oscillations émotives, une confusion, une psychose, un coma, des nausées, des vomissements, des diarrhées et une hépatomégalie avec ictère léger. Le patient peut présenter initialement un collapsus ou un choc cardiovasculaire. La crise thyrotoxique est une urgence vitale nécessitant un traitement rapide.

Diagnostic de l'hyperthyroïdie

  • TSH

  • T4 libre, plus soit T3 libre soit T3

  • Parfois, scintigraphie à l'iode radioactif

Le diagnostic d'hyperthyroïdie repose sur l'anamnèse, l'examen clinique et les tests des fonctions thyroïdiennes. La mesure de la TSH sérique est le meilleur examen car la sécrétion de la TSH est inhibée en cas d'hyperthyroïdie, sauf dans les rares cas où un adénome hypophysaire sécrétant de la TSH ou une résistance hypophysaire aux hormones thyroïdiennes sont en cause.

La T4 libre est augmentée dans l'hyperthyroïdie. Cependant, la T4 peut être faussement normale dans l'hyperthyroïdie vraie chez les patients présentant une maladie systémique grave (comme en cas de concentrations faussement basses dans le syndrome de basse T3) et dans la toxicose T3. Si la T4 libre est normale et la TSH basse en cas de symptomatologie discrète d'hyperthyroïdie, la T3 sérique doit être alors mesurée pour détecter une toxicose T3; une concentration élevée confirme ce diagnostic.

La cause peut souvent être diagnostiquée cliniquement (p. ex., la présence de signes spécifiques de la maladie de Graves-Basedow). Sinon, la captation de l'iode par la thyroïde peut être mesurée en utilisant l'iode 123. Lorsque l'hyperthyroïdie est due à une surproduction hormonale, la captation de l'iode radioactif par la thyroïde est habituellement élevée. Lorsque l'hyperthyroïdie est due à une thyroïdite, à une ingestion d'iode ou à un traitement excessif par des hormones thyroïdiennes, la captation de l'iode radioactif est faible.

Les anticorps anti-récepteur de la TSH peuvent être mesurés pour évaluer la maladie de Graves. La mesure est effectuée chez les femmes enceintes qui ont des antécédents de maladie de Graves au cours du 3e trimestre de la grossesse pour évaluer le risque de maladie de Graves-Basedow néonatale; les anticorps antirécepteurs de la TSH traversent facilement le placenta pour stimuler la thyroïde du fœtus. La plupart des patients atteints de maladie de Graves-Basedow ont des anticorps circulants anti-péroxydase thyroïdienne, et moins ont des anticorps antithyroglobuline.

Le syndrome de sécrétion inappropriée de la TSH est rare. Le diagnostic est confirmé lorsque l'hyperthyroïdie survient avec une élévation des concentrations de T4 et de T3 libres circulantes et une TSH sérique normale ou élevée.

Si une thyrotoxicose factice est suspectée, la thyroglobuline sérique peut être mesurée; elle est généralement basse ou à la limite inférieure de la normale, à la différence de toutes les autres causes d'hyperthyroïdie.

Hyperthyroïdie infraclinique

L'hyperthyroïdie infraclinique est caractérisée par une TSH sérique basse avec une T4 et une T3 libre normale et des symptômes d'hyperthyroïdie absents ou minimes.

L'hyperthyroïdie infraclinique est beaucoup moins fréquente que l'hypothyroïdie infraclinique.

De nombreux patients souffrant d'hyperthyroïdie infraclinique prennent de la lévothyroxine. Les autres causes d'hyperthyroïdie infraclinique sont les mêmes que celles de l'hyperthyroïdie cliniquement apparente.

Les patients dont la TSH sérique est < 0,1 microU/mL (0,1 mU/L) ont une incidence accrue de fibrillation auriculaire (notamment les personnes âgées), une densité minérale osseuse réduite, des fractures plus fréquentes, et une mortalité accrue. Les patients dont la TSH n'est que légèrement inférieure à la normale sont moins susceptibles d'avoir ces caractéristiques.

Traitement de l'hyperthyroïdie

Le traitement de l'hyperthyroïdie dépend de la cause (1) et peut comprendre

  • Iode radioactif

  • Méthimazole ou propylthio-uracile

  • bêta-Bloqueurs

  • Iode

  • Chirurgie

Iodure de sodium radioactif (Iode-131, iode radioactif)

Aux États-Unis, l'iode-131 est le traitement le plus courant pour l'hyperthyroïdie. L'iode radioactif est souvent recommandé comme traitement de choix de la maladie de Graves-Basedow et le goitre nodulaire toxique chez tous les patients, y compris les enfants. Le dosage du iode-131 est difficile à ajuster car la réponse de la glande ne peut pas être prédite; certains donnent une dose standard de 8 à 15 millicurie. D'autres ajustent la dose en fonction de la taille estimée de la thyroïde et l'absorption sur 24 heures pour fournir une dose de 80 à 120 microCurie/g de tissu thyroïdien.

Lorsque suffisamment d'iode 131 est administré pour provoquer une euthyroïdie, environ 25 à 50% des patients deviennent hypothyroïdiens 1 an plus tard, et l'incidence continuant d'augmenter chaque année. Ainsi, la plupart des patients finissent par devenir hypothyroïdiens. Cependant, si des doses plus faibles sont utilisées, l'incidence de récidive est plus élevée. Des doses plus importantes, telles que 10 à 20 millicurie, provoquent souvent une hypothyroïdie dans les 6 mois, et la thérapie ablative (c'est-à-dire, l'iode-131) est donc devenue l'approche préférée.

L'iode radioactif n'est pas utilisé pendant l'allaitement car il se retrouve dans le lait et peut causer une hypothyroïdie chez le nourrisson. Il n'est pas utilisé pendant la grossesse car il traverse le placenta et peut causer de graves hypothyroïdies fœtales. Il n'existe aucune preuve que l'iode radioactif augmente l'incidence de tumeurs, de leucémies, du cancer de la thyroïde ou d'anomalies congénitales chez l'enfant né de femmes hyperthyroïdiennes ayant une grossesse tard dans la vie.

Méthimazole et propylthio-uracile

Ces médicaments antithyroïdiens bloquent la peroxydase thyroïdienne, diminuant l'organification de l'iodure, et inhibant la réaction de couplage. Le propylthio-uracile à fortes doses inhibe également la conversion périphérique de T4 en T3.

Le méthimazole est le médicament de choix. La dose initiale habituelle de méthimazole est de 5 à 20 mg par voie orale 2 ou 3 fois/jour. La normalisation de la TSH est en retard de 1 à plusieurs semaines par rapport à la normalisation des taux de T3 et T4. Par conséquent, lorsque la T4 et la T3 se normalisent, la posologie est réduite à la plus petite dose efficace, en général méthimazole 2,5 à 10 mg 1 fois/jour afin d'éviter d'induire une hypothyroïdie. Le contrôle est généralement obtenu en 2 à 3 mois. Les doses d'entretien de méthimazole peuvent être poursuivies pendant une ou plusieurs années en fonction des circonstances cliniques. Le carbimazole, qui est largement utilisé en Europe mais n'est pas disponible aux États-Unis, est rapidement converti en méthimazole. La dose initiale habituelle est similaire à celle du méthimazole; la dose d’entretien est de 2,5 à 10 mg par voie orale 1 fois/jour ou de 2,5 à 5 mg 2 fois/jour.

En raison de l'insuffisance hépatique sévère chez certains patients de < 40 ans, en particulier chez l'enfant, le propylthio-uracile est actuellement recommandé uniquement dans des situations particulières (p. ex., au cours du 1er trimestre de grossesse, en cas de crise thyrotoxique). La dose initiale habituelle de propylthio-uracile est de 100 à 150 mg par voie orale toutes les 8 heures. Un contrôle rapide peut être obtenu en augmentant la dose de propylthio-uracile à 150 à 200 mg toutes les 8 heures. De tels dosages ou des dosages plus élevés (jusqu'à 400 mg toutes les 8 heures) sont généralement réservés aux patients gravement atteints, y compris ceux en crise thyrotoxique, pour bloquer la conversion de T4 en T3. La dose d'entretien du propylthio-uracile est de 50 mg 2 ou 3 fois/jour

Environ 20 à 50% des patients atteints de la maladie de Graves-Basedow restent en rémission après 1 à 2 ans par l'un ou l'autre de ces médicaments. Le retour à la normale ou une diminution marquée de la taille de la glande, la normalisation de la TSH sérique, et une hyperthyroïdie moins marquée avant le traitement sont de bons indicateurs pronostiques de rémission à long terme. L'utilisation concomitante de médicaments antithyroïdiens et de lévothyroxine n'améliore pas le taux de rémission de la maladie de Graves-Basedow. La rémission du goitre nodulaire toxique étant rare, les médicaments antithyroïdiens ne sont administrés qu'en préparation à un traitement chirurgical ou d'un traitement par l'iode 131.

Les effets indésirables incluent des éruptions cutanées, des réactions allergiques, des anomalies de la fonction hépatique (notamment insuffisance hépatique avec propylthio-uracile), et, chez environ 0,1% des patients, une agranulocytose réversible. Les patients allergiques à un médicament peuvent prendre l'autre, mais une sensibilité croisée peut survenir. En cas d’agranulocytose, le patient ne peut pas prendre l’autre médicament; un autre traitement (p. ex., iode radioactif, chirurgie) doit être entrepris.

Pièges à éviter

  • En cas d’agranulocytose survenant avec un des médicaments anti-péroxydases thyroïdiennes (méthimazole ou propylthiouracile), éviter d'utiliser un autre médicament de la même classe; un autre traitement (p. ex., iode radioactif, chirurgie) doit être utilisé.

Les effets indésirables potentiels ou d'autres caractéristiques des deux médicaments sont différents et guident les indications de chacun d'entre eux. Le méthimazole ne doit être administré qu'1 fois/jour, ce qui améliore l'observance. En outre, lorsque le méthimazole est utilisé à des doses < 20 mg/jour, l’agranulocytose est moins fréquente; avec le propylthio-uracile, l’agranulocytose peut survenir pour n'importe quel dosage.

Le méthimazole a été utilisé avec succès chez la femme enceinte et allaitante sans complication touchant le fœtus ou l'enfant, mais le méthimazole a rarement été associé à des anomalies du cuir chevelu et du tube digestif chez les nouveau-nés ou à une embryopathie rare. Du fait de ces complications, le propylthio-uracile est utilisé au cours du 1er trimestre de la grossesse.

Le propylthio-uracile est préféré pour le traitement de la crise thyroïdienne, car les doses élevées utilisées (plus de 800 mg/jour) bloquent partiellement la conversion périphérique de T4 en T3 en plus de diminuer la production dans la thyroïde.

L'association de fortes doses de propylthio-uracile et de dexaméthasone est un puissant inhibiteur de la conversion de T4 en T3, permettant de corriger les symptômes de l'hyperthyroïdie sévère comme cela est observé en cas de crise thyrotoxique et de normaliser la T3 en une semaine.

bêta-Bloqueurs

La symptomatologie de l’hyperthyroïdie due à la stimulation adrénergique peut répondre aux bêta-bloqueurs; le propranolol a été le plus utilisé, mais l'aténolol ou le métoprolol sont préférables.

D'autres manifestations ne répondent pas.

  • Manifestations qui répondent typiquement aux bêta-bloqueurs: tachycardie, tremblements, symptômes mentaux, rétraction palpébrale; occasionnellement, intolérance à la chaleur, hypersudation, diarrhée, myopathie proximale

  • Manifestations qui ne répondent typiquement pas aux bêta-bloqueurs: goitre, exophtalmie, perte de poids, souffle, augmentation de la consommation d'oxygène et augmentation des taux circulants de thyroxine

Le propranolol est indiqué dans la crise thyroïdienne (voir tableau Traitement de la crise thyrotoxique). Il diminue rapidement la fréquence cardiaque, habituellement dans les 2 à 3 heures lorsqu'il est administré en par voie orale et en quelques minutes lorsqu'il est administré en IV. L'esmolol ne doit être utilisé qu'en unité de soins intensifs car il nécessite une adaptation des doses et un monitorage rapproché. Les bêta-bloqueurs sont également indiqués en cas de tachycardie avec hyperthyroïdie, en particulier chez les patients âgés, parce que les médicaments antithyroïdiens prennent généralement plusieurs semaines pour devenir pleinement efficaces. Les inhibiteurs calciques peuvent contrôler la tachyarythmie chez les patients chez lesquels les bêta-bloqueurs sont contre-indiqués.

Iode

L'iode à doses pharmacologiques inhibe la libération de la T3 et de la T4 en quelques heures et inhibe l'organification de l'iode, un effet transitoire d'une durée de quelques jours à une semaine, après quoi l'inhibition cesse généralement. L'iode est utilisé pour la gestion des urgences de la crise thyrotoxique, chez les patients hyperthyroïdiens devant avoir une chirurgie urgente non thyroïdienne, et (parce qu'il diminue aussi la vascularisation de la glande thyroïde) pour la préparation pré-opératoire des patients qui ont une hyperthyroïdie en vue d'une thyroïdectomie. L'iode n'est généralement pas utilisé en routine pour le traitement de l'hyperthyroïdie. La posologie habituelle est de 2 à 3 gouttes (100 à 150 mg) d'une solution d'iodure de potassium saturée par voie orale 3 ou 4 fois/jour ou iodure de sodium dans 1 L de solution physiologique à 0,9% 0,5 à 1 g en IV lente 1 fois/jour.

Les complications du traitement par iode comprennent l'inflammation des glandes salivaires, la conjonctivite, et une éruption cutanée.

Chirurgie

La chirurgie est indiquée dans la maladie de Graves-Basedow, si l'hyperthyroïdie a récidivé après le traitement par des médicaments antithyroïdiens et en cas de refus du traitement par l'iode 131, en cas d'intolérance aux médicaments antithyroïdiens, de goitre très volumineux et chez certains patients jeunes porteurs d'un adénome toxique et d'un goitre multinodulaire. La chirurgie peut être effectuée chez les patients âgés qui ont des goitres nodulaires géants.

La chirurgie restaure en général une fonction normale. Les récidives post-opératoires varient entre 2 et 16%; le risque d'hypothyroïdie est directement lié à l'importance de la chirurgie. La paralysie des cordes vocales et l'hypoparathyroïdie sont des complications rares. Une solution saturée d'iodure de potassium 3 gouttes (environ 100 à 150 mg) par voie orale 3 fois/jour doit être administrée pendant 10 jours avant la chirurgie pour réduire la vascularisation de la glande. Du méthimazole doit être administré en premier, parce que le patient doit être euthyroïdien avant la prise d'iode. La dexaméthasone peut être ajoutée pour rétablir rapidement l'euthyroïdie. Les interventions chirurgicales sur l'avant du cou sont plus difficiles chez les patients qui ont déjà subi une thyroïdectomie ou un traitement par l'iode radioactif.

Traitement de la crise thyrotoxique

Un protocole de traitement de la crise thyroïdienne est présenté dans le tableau Traitement de la crise thyrotoxique. La cause déclanchante doit également être traitée.

Tableau

Traitement de la dermopathie et de l'ophtalmopathie infiltrantes

En cas de dermopathie infiltrante (dans la maladie de Graves-Basedow), les corticostéroïdes en administration topique ou en injections intralésionnelles peuvent diminuer la dermopathie. La dermopathie disparaît parfois spontanément après plusieurs mois ou années.

L'ophtalmopathie doit être traitée conjointement par l'endocrinologue et l'ophtalmologiste et peut nécessiter du sélénium, des corticostéroïdes, une radiothérapie orbitaire, ou la chirurgie. La thyroïdectomie chirurgicale peut résoudre ou prévenir la progression de l'ophtalmopathie. Le teprotumumab, un inhibiteur du récepteur de l'insuline-like growth factor 1 (IGF-1), est un traitement très efficace de l'ophtalmopathie modérément sévère (2). Le traitement à l'iode radioactif peut accélérer l'évolution de l'ophtalmopathie lorsque cette dernière est active et il est donc contre-indiqué dans cette phase active.

Prise en charge de l'hyperthyroïdie infraclinique

Chez les patients souffrant d'hyperthyroïdie infraclinique qui prennent de la lévothyroxine, la réduction de la dose est la prise en charge la plus appropriée, à moins que le traitement ne vise à freiner la TSH en cas de cancer de la thyroïde.

Le traitement est indiqué chez les patients souffrant d'hyperthyroïdie infraclinique (TSH sérique < 0,1 mU/L), en particulier en cas de fibrillation auriculaire ou de réduction de la densité minérale osseuse. Le traitement habituel est l'iode-131, mais de faibles doses de méthimazole sont également efficaces.

Références pour le traitement

  1. 1. Ross DS, Burch HB, Cooper DS, et al: 2016 American Thyroid Association Guidelines for Diagnosis and Management of Hyperthyroidism and Other Causes of Thyrotoxicosis. Thyroid 26(10):1343–1421, 2016. doi: 10.1089/thy.2016.0229

  2. 2. Douglas RS, Kahaly GJ, Patel A, et al: Teprotumumab for the treatment of active thyroid eye disease. N Engl J Med 382(4):341–352. 2020. doi: 10.1056/NEJMoa1910434

Points clés

  • L'hyperthyroïdie a de nombreuses causes; l'étiologie la plus fréquente est la maladie de Graves-Basedow, provoquée par la synthèse excessive d'hormones par une thyroïde anormale.

  • D'autres causes d'hyperthyroïdie comprennent une stimulation excessive de la glande thyroïde normale (p. ex., par la TSH, l'hCG [human chorionic gonadotrophin], l'ingestion d'iode ou de médicaments contenant de l'iode), la synthèse excessive d'hormones thyroïdiennes par une thyroïde anormale (p. ex., goitre nodulaire toxique), libération excessive d'hormones thyroïdiennes (p. ex., due à une thyroïdite), ou l'ingestion de quantités excessives d'hormones thyroïdiennes.

  • La symptomatologie est variée, mais comprend une tachycardie, une fatigue, une perte de poids, une nervosité, des tremblements; les patients atteints de la maladie de Graves-Basedow peuvent aussi avoir une dermopathie infiltrante et une exophtalmie.

  • La thyroxine (T4) et/ou la triiodothyronine (T3), libres ou totales, sont élevées et la TSH est inhibée (sauf dans des cas plus rares de causes hypophysaires d'hyperthyroïdie).

  • La synthèse hormonale peut être inhibée par le méthimazole (ou, dans certains cas, le propylthio-uracile) et les symptômes adrénergiques soulagés par les bêta-bloqueurs; le traitement à long terme peut nécessiter la destruction de la thyroïde par l'iode radioactif ou la chirurgie.

  • Une crise thyrotoxique, résultant d'une hyperthyroïdie sévère non traitée ou insuffisamment traitée, est une urgence potentiellement mortelle qui se manifeste par des symptômes d'hyperthyroïdie graves et qui peut entraîner un collapsus ou un choc cardiovasculaire; elle est traitée par un traitement antithyroïdien, de l'iode et un support hémodynamique.

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