Prise en charge de l'accouchement normal

ParRaul Artal-Mittelmark, MD, Saint Louis University School of Medicine
Vérifié/Révisé mai 2021
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De nombreuses unités obstétricales n'utilisent qu'une seule salle pour le travail, l'accouchement, la surveillance post-partum, pour que la mère, les personnes qui l'accompagnent et le nouveau-né restent dans la même pièce tout au long de cette période. D'autres centres utilisent une salle de pré-travail traditionnelle et une salle d'accouchement séparée, dans laquelle la femme est transférée quand l'accouchement est imminent. Le partenaire de la femme ou toute autre personne proche peut être autorisé à l'accompagner. En salle d'accouchement, le périnée est nettoyé et recouvert d'un champ stérile et on procède à l'accouchement du nouveau-né. Après l'accouchement, la patiente peut soit rester dans la salle d'accouchement, soit être transférée dans une unité de post-partum.

La prise en charge des complications pendant l'accouchement nécessite des mesures supplémentaires (telles qu'un déclenchement du travail).

Anesthésie

Les options sont l'anesthésie locale, régionale ou générale. Les anesthésiques locaux et les opiacés sont fréquemment utilisés. Ces médicaments passent la barrière placentaire; ainsi, pendant l'heure précédant l'accouchement, de tels médicaments doivent être administrés en petite dose pour éviter une intoxication (p. ex., dépression du système nerveux central, bradycardie) chez le nouveau-né.

Utilisés seuls, les opiacés n'assurent pas une analgésie adéquate et sont donc, le plus souvent, associés à des anesthésiques.

Anesthésie régionale

Plusieurs méthodes sont disponibles.

L'injection dans l'espace péridural lombaire d'un anesthésique local est la méthode la plus souvent employée. L'analgésie péridurale est de plus en plus utilisée pour les accouchements, y compris les césariennes et a remplacé le bloc du nerf honteux interne et des nerfs du périnée ou le bloc paracervical. En cas d'analgésie épidurale, les médicaments peuvent être titrés au besoin au cours du travail. Les anesthésiques locaux les plus utilisés pour l'anesthésie péridurale (p. ex., bupivacaïne) ont une durée d'action et un délai d'apparition des effets plus long que ceux utilisés pour le bloc des nerfs honteux (p. ex., lidocaïne).

La rachianesthésie (injection dans les espaces paraspinaux sous-arachnoïdiens) peut être utilisée pour les césariennes mais est moins adaptée pour les accouchements par voie basse, car son action est de courte durée (empêchant son utilisation pendant le travail) et elle peut entraîner de faibles risques de céphalées secondaires. En cas de rachianesthésie, la patiente doit être constamment surveillée et les signes vitaux doivent être contrôlés toutes les 5 min afin de détecter et traiter une éventuelle hypotension.

Anesthésie locale

Les options sont l'anesthésie locale, le bloc des nerfs honteux et des nerfs du périnée, et le bloc paracervical.

Le bloc des nerfs honteux, peu utilisé du fait du recours répandu à la péridurale, consiste en l'injection d'un anesthésique local dans la paroi vaginale; ainsi, le nerf honteux est inondé d'anesthésique à l'endroit où il croise l'épine sciatique. Ce blocage anesthésie la partie inférieure du vagin, le périnée et la partie postérieure de la vulve; la partie antérieure de la vulve, innervée par des dermatomes lombaires, n'est pas anesthésiée. Le bloc des nerfs honteux est une méthode sûre et simple pour les accouchements vaginaux spontanés non compliqués si la femme désire accoucher et pousser ou si le travail est trop avancé et qu'on ne dispose plus de temps pour une anesthésie péridurale. Les complications du bloc pudendal comprennent l'injection intravasculaire d'anesthésiques, l'hématome et l'infection.

Les infiltrations du périnée par un anesthésique sont souvent utilisées, bien que cette méthode ne soit pas aussi efficace qu'un bloc des nerfs honteux bien conduit.

L'anesthésie paracervicale est peu indiquée pour les accouchements du fait d'une incidence de bradycardie fœtale > 10% (1). Elle est surtout utilisée dans les cas d'avortement au 1er trimestre ou au début du 2e trimestre. La technique consiste en l'injection de 5 à 10 mL de lidocaïne à 1% ou de chloroprocaïne (qui a une demi-vie plus courte) en position 3 et 9 h; la réponse analgésique est de courte durée.

Anesthésie générale

L'anesthésie générale par des produits inhalés puissants et volatils (p. ex., isoflurane) pouvant entraîner une dépression respiratoire marquée chez le fœtus, l'anesthésie générale n'est pas recommandée pour l'accouchement en routine.

Exceptionnellement, l'analgésie par mélange de protoxyde d'azote et oxygène à 40% peut être utilisée pendant l'accouchement vaginal tant que l'on maintient un contact verbal avec la patiente.

Le thiopental, un hypnotique-sédatif, est fréquemment administré en IV avec d'autres médicaments (p. ex., succinylcholine, protoxyde d'azote associé à de l'oxygène) dans le cas d'anesthésie générale pour césarienne; utilisé seul, le thiopental fournit une analgésie insuffisante. Avec le thiopental, l'induction est rapide et le réveil rapide. Il est concentré dans le foie du fœtus, évitant ainsi des taux élevés dans le système nerveux central; des taux élevés dans le système nerveux central peuvent être cause de dépressions néonatales.

L'analgésie péridurale, qui peut être rapidement transformée en anesthésie péridurale, a réduit le recours à l'anesthésie générale sauf pour l'accouchement par césarienne.

Référence d'anesthésie

  1. 1. LeFevre ML: Fetal heart rate pattern and postparacervical fetal bradycardia. Obstet Gynecol 64 (3):343–6, 1984.

Accouchement du fœtus

Un examen vaginal est effectué pour déterminer la position et la station de la tête fœtale; la tête est habituellement la partie de présentation (voir figure Séquence des événements de l'accouchement des présentations du vertex). Lorsque l'effacement est complet et le col entièrement dilaté, la femme est informée qu'elle doit pousser vers le bas durant chaque contraction afin de favoriser la progression de la tête dans le pelvis et de dilater progressivement l'introitus vaginal, permettant à la tête d'apparaître. Dès qu'une partie de la tête (3 ou 4 cm) est visible pendant une contraction chez une nullipare (un peu plus tôt chez la multipare), les manœuvres suivantes peuvent favoriser l'accouchement et réduire le risque de déchirure périnéale:

  • Si le médecin est droitier, il place sa paume gauche sur la tête de l'enfant pendant une contraction afin de contrôler et, si nécessaire, de ralentir légèrement la progression.

  • Simultanément, le médecin place les doigts incurvés de sa main droite contre le périnée qui se dilate, au travers duquel le front ou le menton de l'enfant peuvent être perçus.

  • Le médecin peut, pour avancer la tête, se bander une main dans une serviette et, les doigts incurvés, exercer une pression contre le dessous du front ou du menton (manœuvre de Ritgen modifiée).

Le médecin contrôle la progression de la tête pour permettre un accouchement lent et surveillé.

Séquence des événements de l'accouchement des présentations du vertex

Les forceps ou la ventouse sont souvent utilisés pour l'accouchement vaginal

  • La 2e période de travail est susceptible d'être prolongée (p. ex., car la mère est trop épuisée pour pousser de manière adéquate ou parce que l'anesthésie péridurale inhibe le pousser vigoureux).

  • La femme a un trouble tel qu'un trouble cardiaque et doit éviter de pousser pendant la 2e phase du travail.

En cas d'anesthésie locale (bloc des nerfs honteux ou infiltration du périnée), le recours aux forceps ou à la ventouse est rarement nécessaire sauf en cas de complications; l'anesthésie locale ne perturbe habituellement pas l'accouchement.

Les indications des accouchements par forceps et par ventouse sont globalement les mêmes.

Les deux procédures présentent des risques. Les lacérations périnéales des 3e et 4e degrés (1) et les lésions du sphincter anal (2) tendent à être plus fréquentes après l'accouchement au forceps qu'après l'extraction par la ventouse. Les autres risques pour le fœtus en cas d'utilisation du forceps comprennent les lacérations faciales et les paralysies du nerf facial, les abrasions de la cornée, les traumatismes oculaires externes, des fractures du crâne et les hémorragies intracrâniennes (3,4).

Les risques fœtaux associés à l'extraction par la ventouse comprennent les lacérations du cuir chevelu, la formation de céphalhématomes et les hémorragies sous-galactiques ou intracrâniennes; des hémorragies rétiniennes et des taux accrus d'hyperbilirubinémie ont été signalés.

L'épisiotomie n'est pas pratiquée de façon systématique pour la plupart des accouchements classiques; elle n'est effectuée que si le périnée ne se dilate pas de façon adéquate et gêne l'accouchement. Un anesthésique local peut être infiltré si l'analgésie péridurale est insuffisante. L'épisiotomie permet d'éviter un étirement excessif et diminue le risque de déchirure irrégulière des tissus périnéaux, y compris les déchirures antérieures. Une incision d'épisiotomie qui se prolonge seulement à travers la peau et le corps périnéal sans interruption des muscles du sphincter anal (épisiotomie du 2e degré) est généralement plus facile à réparer qu'une déchirure périnéale.

Dans l'épisiotomie la plus utilisée, on effectue une incision médiane allant du milieu de la fourchette postérieure vers le rectum en arrière. L'extension vers le sphincter rectal ou vers le rectum est un risque en cas d'épisiotomie médiane, mais si elle est reconnue à temps, l'extension peut être réparée efficacement et bien cicatriser. Les déchirures et les extensions rectales peuvent être habituellement prévenues en maintenant la tête du nourrisson bien fléchie jusqu'à ce que la bosse occipitale passe sous l'arcade sous-pubienne.

Un autre type d'épisiotomie est une incision médiolatérale faite à partir de la fourchette à un angle de 45° latéralement des deux côtés. Ce type d'épisiotomie ne s'étend habituellement pas jusqu'au sphincter ni au rectum (5), mais les douleurs post-opératoires sont plus importantes, elle est plus difficile à réparer, induit une perte plus importante de sang et les délais de guérison plus longs qu'en cas d'épisiotomie médiane (6). Ainsi, on préfère souvent l'épisiotomie médiane.

Cependant, la pratique de l'épisiotomie est de moins en moins courante, car l'extension ou les déchirures vers le sphincter ou le rectum sont une source de préoccupation. L'épisioproctotomie (incision intentionnelle du rectum) n'est pas recommandée en raison du risque de fistule rectovaginale.

Environ 35% des femmes ont une dyspareunie après une épisiotomie (7).

Après l'expulsion de la tête, le médecin doit déterminer si le cordon ombilical est enroulé autour du cou. Si c'est le cas, le médecin doit essayer de dévider le cordon; si le cordon ne peut être rapidement retiré de cette façon, le cordon peut être clampé et coupé.

Après l'expulsion de la tête, le corps de l'enfant tourne et les épaules se placent en position antéro-postérieure; une légère pression à la baisse sur la tête délivre l'épaule antérieure sous la symphyse. La tête est soulevée doucement, l'épaule postérieure glisse sur le périnée et le reste du corps suit sans difficulté. Le nez, la bouche et le pharynx sont aspirés avec une poire effilée afin de réduire le mucus et les liquides et permettre les premières respirations. Si une traction appropriée et la poussée maternelle ne libèrent pas l'épaule antérieure, le médecin doit expliquer à la femme ce qui doit être fait ensuite et commencer l'accouchement d'un fœtus avec dystocie des épaules.

Le cordon ombilical doit être doublement clampé et coupé entre les 2 clamps et un clamp en matière plastique doit être appliqué à environ 2 ou 3 cm du site d'insertion du cordon chez l'enfant. Si l'on suspecte un risque pour le fœtus ou le nouveau-né, un segment de cordon ombilical est doublement clampé pour effectuer une analyse des gaz du sang artériel. Un pH artériel > 7,15 à 7,20 est considéré comme normal.

Retarder le clampage du cordon ombilical de 30 à 60 secondes est recommandé pour augmenter les réserves de fer, ce qui permet de:

  • Pour tous les nourrissons: possibilités de bénéfices en termes de développement

  • Dans le cas des nouveau-nés prématurés: amélioration transitoire de la circulation et diminution du risque d'entérocolite nécrosante et d'hémorragie intraventriculaire (cependant, risque légèrement accru de besoin de photothérapie)

Une alternative au clampage retardé chez les prématurés est la traite du cordon ombilical, qui consiste à repousser le sang vers le nourrisson en saisissant et en trayant le cordon avant qu'il ne soit clampé. Cependant, les preuves pour ou contre la traite du cordon ombilical sont insuffisantes.

Le nourrisson est complètement séché, ensuite placé sur l'abdomen de la mère ou, si la réanimation est nécessaire, sur une table de réanimation chauffée.

Références pour l'accouchement du fœtus

  1. 1. Cargill YM, MacKinnon CJ, Arsenault MY, et al: Guidelines for operative vaginal birth. J Obstet Gynaecol Can 26 (8):747–761, 2004. https://doi.org/10.1016/S1701-2163(16)30647-8

  2. 2. Fitzpatrick M, Behan M, O'Connell PR, et al: Randomised clinical trial to assess anal sphincter function following forceps or vacuum assisted vaginal delivery. BJOG 110 (4):424–429, 2003. doi: 10.1046/j.1471-0528.2003.02173.x

  3. 3. Towner D, Castro MA, Eby-Wilkens E, et al: Effect of mode of delivery in nulliparous women on neonatal intracranial injury. N Engl J Med 341 (23):1709–1714, 1999. doi: 10.1056/NEJM199912023412301

  4. 4. Walsh CA, Robson M, McAuliffe FM: Mode of delivery at term and adverse neonatal outcomes. Obstet Gynecol 121(1):122–128, 2013. doi: 10.1097/AOG.0b013e3182749ac9

  5. 5. Shiono P, Klebanoff MA, Carey JC: Midline episiotomies: More harm than good? Obstet Gynecol 75 (5):765–770, 1990.

  6. 6. Thacker SB, Banta HD: Benefits and risks of episiotomy: An interpretative review of the English language literature, 1860-1980. Obstet Gynecol Surv 38 (6):322–338, 1983.

  7. 7. Bex PJ, Hofmeyr GJ: Perineal management during childbirth and subsequent dyspareunia. Clin Exp Obstet Gynecol 14 (2):97–100, 1987.

Accouchement du placenta

La prise en charge active du 3e stade du travail réduit le risque d'hémorragie post-partum, qui est une cause majeure de morbidité et de mortalité maternelles. La prise en charge active consiste à administrer à la femme un médicament utérotonique tel que l'ocytocine dès que le fœtus est accouché. Les médicaments utérotoniques aident l'utérus à se contracter fermement et à diminuer les saignements dus à l'atonie utérine, la cause la plus fréquente d'hémorragie du post-partum. L'ocytocine peut être administrée sous la forme de 10 unités IM ou sous la forme d'une perfusion de 20 unités/1000 mL de solution physiologique à 125 mL/h. L'ocytocine ne doit pas être administrée en une seule dose IV massive, qui risque de déclencher un trouble du rythme cardiaque.

Après l'expulsion, et l'administration d'ocytocine, le médecin tire doucement sur le cordon et place une main doucement sur l'abdomen, au-dessus du fond utérin, pour sentir la reprise des contractions; le décollement du placenta se produit généralement lors de la 1ère ou de la 2e contraction, souvent avec un petit flot de sang provenant de l'hématome rétro-placentaire physiologique. La mère peut habituellement favoriser la sortie du placenta en poussant. Si elle ne peut pas et si une hémorragie significative se produit, le placenta peut généralement être évacué (exprimé) en plaçant une main sur l'abdomen et en exerçant une pression ferme vers le bas sur l'utérus (caudalement); cette procédure est effectuée uniquement si l'utérus est ferme parce que la pression sur l'utérus flasque peut l'amener à s'inverser. Si cette procédure se révèle inefficace, le cordon ombilical est maintenu tendu tandis qu'une main placée sur l'abdomen pousse vers le haut l'utérus, en s'éloignant du placenta; la traction sur le cordon ombilical est évitée car elle peut inverser l'utérus.

Si le placenta n'a pas été accouché dans les 45 à 60 min qui suivent l'accouchement, une extraction manuelle peut être nécessaire; un analgésique ou une anesthésie appropriés sont requis. Pour l'ablation manuelle, le clinicien insère sa main dans la cavité utérine, et sépare le placenta de ses attaches, puis extrait le placenta. Dans de tels cas, il faut s'attendre à un placenta anormalement adhérent (placenta accreta).

L'intégrité du placenta doit être contrôlée, car la rétention de quelques fragments placentaires dans l'utérus peut, plus tard, entraîner des hémorragies ou des infections. Si le placenta est incomplet, la cavité utérine doit être explorée à la main. Quelques obstétriciens explorent systématiquement à la main la cavité utérine après chaque accouchement. Cependant, l'exploration n'est pas très plaisante et n'est pas conseillée en routine.

Soins du post-partum immédiat

On examine le col et le vagin à la recherche de déchirures, qui, si présentes, sont recousues, comme toute épisiotomie.

Puis, si la mère et le nourrisson se remettent normalement, un lien peut commencer à s'établir. De nombreuses mères expriment le souhait de donner le sein immédiatement après l'accouchement et cela doit être encouragé. Mère, père, partenaire et nourrisson doivent pouvoir rester ensemble dans une pièce isolée et chaude durant au moins une heure pour favoriser la création du lien parents-enfant. Puis, le nourrisson est ensuite transféré à la pouponnière ou laissé à sa mère selon son désir.

Pendant la 1ère heure suivant l'accouchement, la mère doit être observée étroitement afin de s'assurer que l'utérus se contracte (palpation abdominale du globe utérin) et pour contrôler hémorragies, anomalies de la pression artérielle et état général.

Le temps compris entre l'expulsion du placenta et la 4e heure du post-partum est dénommé 4e étape du travail; la plupart des complications, notamment hémorragiques, se produisent à ce moment, et une observation fréquente est obligatoire.

(Voir aussi Soins du post-partum et troubles associés.)

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